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Femme de Srebrenica au camp de réfugiés de Karaula près de Tuzla (Août 2002) Photo Tarik Samarah |
Mémorial de POTOCARI, près de Srebrenica
Tous les 11 julilet, des dizaines de milliers de personnes se retrouvent au mémorial créé en mémoire des victimes.
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Le 11 juillet 1995, quelques mois avant la fin du conflit intercommunautaire de Bosnie (1992-1995), les troupes serbes bosniennes avaient pris le contrôle de Srebrenica, enclave musulmane proclamée en 1993 "zone protégée" de l'ONU. Quelque 8000 hommes et adolescents ont été tués en l'espace de quelques jours. Leurs restes ont été retrouvés dans plusieurs dizaines de charniers. Ce massacre, perpétré par des unités de l'Armée de la République serbe de Bosnie (VRS) sous le commandement du général Ratko Mladic, appuyées par une unité paramilitaire de Serbie a été qualifié de génocide par la justice internationale.
Secondary mass grave from which 506 incomplete corpses were exhumed. Kamenica near Zvornik Eva Klonowski, anthropologist from Iceland, holding a victim's arm. (august 2002) Photo Tarik Samarah |
Tarik Samarah
Tarik Samarah is a photographer born in Zagreb in 1965 and is the founder of the Memorial Gallery 11/07/95
http://galerija110795.ba/en/
"After Auschwitz the world said Never again", Samarah states, explaining the project,"but Srebrenica happened. After Srebrenica, massacres and crimes continue ... I would be ashamed to be speechless or quiet in this kind of world."
SREBRENICA |
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forêt environnante de Srebrenica |
VISEGRAD
La ville la plus orientale de la Bosnie-Herzégovine, Visegrad est mentionnée pour la première fois en 1433. Elle fait alors partie du royaume de Bosnie. Peu après, la ville est conquise par les Ottomans et devient objet d'une attention particulière à cause de sa position géostratégique. Toutes les caravanes reliant Istanbul et les Balkans passent par Visegrad, un haut lieu des échanges culturels entre l'Orient et l'Occident, Belgrade et Sarajevo, la chrétienté et l'islam.
Le pont sur la Drina
Construit à la fin du XVIème siècle sur la rivière Drina, à l'est de la Bosnie-Herzégovine, le pont Mehmed Pacha Sokolovic de Visegrad a été construit par Mimar Koca Sinan, l'architecte de la cour, sur ordre du grand vizir Mehmed Pacha Sokolovic. Il est caractéristique de l'apogée de l'architecture monumentale et du génie civil ottomans. Il possède 11 arches maçonnées dont les ouvertures sont comprises entre 11 et 15 m, ainsi qu'une rampe d'accès à l'orthogonale de quatre arches sur la rive gauche de la rivière. Ce pont, long de 179,5 m, est une réalisation majeure de Sinan, un des plus grands architectes et ingénieurs du style ottoman classique et un contemporain de la Renaissance italienne, avec laquelle son travail peut être comparé. L'élégance de ses proportions et la noblesse monumentale uniques du bien témoignent de la grandeur de ce style d'architecture.
Le pont de Visegrad fut une oeuvre majeure d'aménagement du territoire et de contrôle de l'intérieur des Balkans par l'Empire ottoman, depuis Istanbul. Il forme alors un point remarquable de la route qui relie les plaines du Danaube à Sarajevo et à la côte Adriatique, notamment au port libre de Raguse (Dubrovnik). L'époque de sa construction correspond à l'apogée de l'Empire ottoman, à la suite du règne de Soliman le Magnifique (1520-1566), C'est une longue période de paix et de prospérité pour la région.
Placé dans une position géostratégique, le pont témoigne d'importants échanges culturels entre les Balkans, l'Empire ottoman et le monde méditerranéen, entre la chrétienté et l'islam, sur la longue durée de l'histoire, et particulièrement lors des nombreux conflits du XXème siècle. Sa valeur culturelle transcende les frontières à la fois nationales et culturelles.
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Ivo Andric, écrivain yougoslave né le 9 octobre 1892 dans une famille croate à Travnik en Bosnie-Herzégovine alors administrée par L'Autriche-Hongrie, mort le 13 mars 1975 à Belgrade, consacre son oeuvre le plus célèbre au pont de Visegrad ."Le pont sur la Drina"est un véritable chef d'oeuvre de la littérature, une chronique de quatre siècles d'histoire de Bosnie où tout se concentre autour et sur le pont de Visegrad. En 1961, cet écrivain reçoit le Prix Nobel de Littérature, il est alors félicité par le comité Nobel pour "la force épique avec laquelle il a su retracer les thèmes de l'histoire de son pays", décrivant tout à la fois les haines ente confessions et nationalités rivales et la complexité des rapports humains. Un roman mystérieusement prémonitoire et prophétique.
Mehmed pacha Sokolovic
Né en 1505 ou 1506 à Sokolovici (Bosnie-Herzégovine) dans une famille serbe orthodoxe, mort en 1579 à Istanbul, fut le grand vizir de Soliman le Magnifique, de Selim II et de Murad III de 1565 à 1579.
Vers l'âge de 10 ans, il fut victime de la pratique ottomane du "devsirme" , système de recrutement forcé consistant à réquisitionner des garçons enfants et adolescents dans les populations chrétiennes pour les élever comme des Turcs musulmans, afin de les destiner pour la plus grande part, à faire partie des troupes d'élite ottomanes:l es janissaires, et pour occuper des fonctions au Palais et dans l'administration.
"Ce jour de novembre, une longue caravane de chevaux chargés arriva sur la rive gauche de la rivière, où elle s'arrêta pour la nuit. L'agha des janissaires, avec son escorte armée, retournait à Constantinople, après avoir pris dans les villages de Bosnie orientale le nombre d'enfants chrétiens prévu en guise de tribut...
Les enfants sélectionnés étaient expédiés sur de petits chevaux bosniaques, en un long convoi. Deux panières tressées étaient arrimées, comme pour transporter des fruits, de part et d'autre des bêtes, et dans chacune d'elles on avait mis un enfant avec son petit paquetage et une part de pita au fromage, dernière chose qu'il emportât de la maison paternelle. De ces panières, qui se balançaient en rythme en crissant dépassaient les visages frais et apeurés des garçons enlevés...
À quelque distance des derniers chevaux de cette caravane peu ordinaire, suivaient, courant en tous sens et à bout de souffle, de nombreux parents et cousins de ces enfants que l'on emmenait pour toujours et qui, une fois circoncis et turquisés dans ce monde nouveau, oubliant leur foi, leur pays et leurs origines, passeraient leur vie dans les détachements de janissaires ou dans un autre corps d'élite de l'Empire...
Ce jour de Novembre, dans une de ces nombreuses panières, un garçon brun d'une dizaine d'années, originaire du village haut perché de Sokolovici, regardait autour de lui, en silence, les yeux secs ... Il devait à jamais garder dans sa mémoire la rive pierreuse plantée de rares saules dénudés et d'un gris triste, le passeur hideux et le moulin à eau délabré, plein de toiles d'araignées et de courants d'air, où ils passèrent la nuit en attendant que tout le monde réussît à franchir les eaux troubles de la Drina au-dessus de laquelle croassaient des corneilles ... L'enfant emporta avec lui le souvenir de cet endroit où la route était interrompue, où le désespoir et la misère se concentraient et se déposaient sur les berges rocailleuses de la rivière qu'il était difficile, coûteux et de plus dangereux de franchir...
Ce qu'il advint plus tard de ce petit garçon emmené dans la panière, tous les livres d'histoire le racontent dans toutes les langues, et c'est encore mieux connu de par le monde que chez nous."Avec le temps, il devint un jeune et courageux gardien des armes à la cour du sultan, puis un chef militaire et un homme d'État de renommée mondiale, Mehmed pacha Sokoli qui mena sur trois continentes des guerres victorieuses pour la plupart, agrandit les frontières de l'Empire turc, assura la sécurité au-dehors et par une bonne administration consolida les affaires au-dedans. Au long de ces soixante et quelques années, il fut au service de trois sultans ... s'éleva à la hauteur de la puissance et du pouvoir que nous ne soupçonnons même pas, où peu de gens se hissent et parviennent à rester. Cet homme nouveau qu'il devint dans un monde étranger ... dut oublier tout ce qu'il avait laissé dans le pays d'où on l'avait naguère emmené ... Mais le sentiment de malaise que tout cela avait engendré ne disparut jamais complètement. Au contraire, avec les années et la vieillesse, il revenait de plus en plus souvent: toujours la même ligne noire qui lui traversait la poitrine et la transperçait d'une douleur particulière, familière depuis l'enfance ... Les yeux fermés, le vizir attendait alors que la lame noire passe et que la douleur s'évanouisse. C'est dans un de ces moments qu'il lui vint à l'idée qu'il se libérerait de ce malaise s'il pouvait faire disparaître le bac sur la lointaine Drina ... en surmontant d'un pont les rives escarpées et les eaux perfides, en réunissant les deux bouts de la route qui était interrompue à cet endroit, reliant du même coup de façon sûre et définitive la Bosnie à l'Orient, le pays de ses origines aux lieux où s'était déroulée sa vie.
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... "Celui-ci, a environ deux cents cinquante pas de longueur, et quelque dix pas de largeur, sauf en son milieu où il s'élargit en deux terrasse parfaitement symétriques, de chaque côté de la chaussée, doublant ainsi sa largeur. C'est la partie du pont qu'on appelle la "kapia". À cet endroit , en effet, sur la pile centrale qui s'évase vers le haut, des contreforts construits de part et d'autre de la chaussée soutiennent de chaque côté une terrasse saillant audacieusement et en proportion harmonieuse de la ligne droite du pont, dans le vide au-dessus de l'eau bruyante et verte. Les terrasses ont environ cinq pas de longueur et autant de largeur, elles sont entourées d'un parapet de pierre, comme le pont sur toute sa longueur, mais sont à ciel ouvert. La terrasse de droite, en venant de la ville s'appelle le "sofâ". Elle est surélevée de deux marches, bordée de sièges auxquels le parapet sert de dossier, et les marches, les sièges et le parapet sont de la même pierre claire , comme coulés dans un même moule. La terrasse de gauche en face du sofâ, lui est identique, mais elle est vide, sans sièges. Au milieu de sa bordure, un mur se dresse plus haut que hauteur d'homme; vers son sommet est scellée une plaque de marbre blanc, où est gravée une riche inscription turque - un "tarikh" - avec un versés qui, en treize vers, célèbre le nom de celui qui a fait ériger le pont et indique l'année de sa construction ... Sur cette terrasse est installé un cafetier, avec ses "dzervas" de cuivre, ses tasses rondes, un brasero toujours attisé et un jeune garçon qui porte les cafés en face, aux clients du sofâ. C'est tout cela la kapia...
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À Visegrad, c'est sur le pont reliant les deux rives de la Drina - mais aussi la Serbie et la Bosnie, l'Orient et l'Occident - que se concentre depuis le XVIe siècle la vie des habitants, chrétiens, juifs, musulmans de Turquie ou "islamisés". C'est là que l'on palabre, s'affronte, joue aux cartes, écoute les proclamations des maîtres successifs du pays, Ottomans puis Austro-Hongrois.
Le grand romancier yougoslave Ivo Andric, prix Nobel de littérature en 1961 nous rapporte ici la chronique de ces quatre siècles, mêlant la légende à l'histoire, la drôlerie à l'horreur.
Ce roman paru en 1954, oeuvre d'un écrivain bosniaque par naissance, croate par son origine et serbe par ses engagements d'alors nous paraît aujourd'hui mystérieusement prophétique.(quatrième de couverture)
Frontière naturelle avec la Serbie, la rivière Drina coule principalement dans les Alpes dinariques. Elle est formée par la réunion des rivières Tara et Piva qui, nées au Montenegro confluent à la limite des régions de Bosnie et d'Herzégovine au village de Scepan Polje. La Drina est considérée comme l'une des plus belles rivières de Bosnie-Herzégovine.
cimetière militaire serbe à Visegrad |
Trop jeunes pour mourir ...
église serbe orthodoxe de Visegrad |
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Monastère Serbe Orthodoxe de DOBRUN frontière République Serbe de Bosnie / Serbie fresque du XIV ème siècle représentant le roi Dusan, la reine Jelena et le prince Uros |
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Situé dans la vallée de la rivière Rzava, le petit monastère de DOBRUN, établi en 1343 est l'un des plus anciens du pays. Détruit plusieurs fois, il a été reconstruit après la seconde guerre mondiale. Il abrite des fresques du XIV ème siècle.
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moine de Dobrun |
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rencontre entre Dobrun et Visegrad |
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Et le voyage continue ...
And the journey continues ...
nomadensolo@gmail.com
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