RAJASTHAN




De Jaipur à Jaisalmer
5ème voyage en Inde


La particularité de l'Histoire du Rajasthan, "le pays des rois", réside dans l'existence d'une mosaïque de petits royaumes rivaux qui ont cohabité de façon plus ou moins houleuse jusqu'au XIX e siècle. Le chaos produit par les incessantes rivalités dynastiques explique la prolifération de forteresses : Jaisalmer, Jodhpur, Chittaurgarh, Amber... noms chargés d'histoire tout autant que de légendes.








À l'Indépendance de l'Inde en 1947, tous les souverains rajputs se rallient à l'Inde démocratique, renonçant à tout pouvoir effectif sur leur royaume. En échange, Delhi leur accorde quelques privilèges dont l'octroi de pensions et l'exemption d'impôts sur la fortune. Le Rajputana, passé sous le contrôle de New-Delhi, forme un nouvel État indien qui prend le nom de Rajasthan. Sa configuration définitive  date de 1956. Plusieurs maharajas deviennent députés, certains diplomates. En 1970, Indira Gandhi ayant supprimé leurs pensions, beaucoup se lancent dans les affaires et transforment leurs palais en hôtels de luxe.

Mais, avant de me poser à Jaipur, sa capitale ...

petit détour par la Thaïlande, Chiang Mai, mon point de chute en Asie, puis Chiang Rai puis Chiang Khong où je sors de Thaïlande pour entrer au Laos à Houay Xai.  






   
     Détail d'une murale dans un temple de Chiangmai



    
    à la frontière Thaï - Laos

  de Houay Xai , descente du Mékong sur un slowboat jusqu'à Pakbeng


    6 heures de navigation  




















                                      La Nam Bèng, affluent du Mékong à Pakbeng

23 novembre 1887... 
Nous avons passé la nuit à Pakbeng près du confluent d'un petit cours d'eau que les barques marchandes remontent non sans peine. Rudement secouée par l'eau impétueuse, mon embarcation menaçait sans cesse d'arracher du sable les piquets trop faibles tenant les amarres. À demi-vêtu, j'ai dû réveiller souvent les rameurs pour qu'ils les assurent. N'ayant pas pris garde, j'ai été saisi par cet air glacé qui, en buée humide, circule sur le fleuve. Me voilà malade !

Auguste Pavie, Passage du Mékong au Tonquin (1887-1888)


En mini-bus de Pakbeng à Oudomxai (140 km) puis en bus d'Oudomxai à Luang Prabang (145 km)






Retour à Luang Prabang 




Une légende raconte que Bouddha aurait souri lorsqu'il se reposa à cet endroit au cours de l'un de ses voyages en annonçant qu'une capitale riche et puissante s'y élèverait un jour.

 Je ne me lasse pas de cette ancienne petite cité royale, inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, bâtie sur une péninsule formée par le Mékong et la rivière Nam Khan, au caractère singulièrement mystique et sacré, véritable joyau en Asie selon moi et havre de paix où tout semble réuni pour séduire le voyageur qui s'y attarde  et où règne une douceur de vivre, mélange d'une certaine indolence mais aussi d'une spiritualité qui se ressent à chaque coin de rue et qui semble ne laisser personne indifférent. Cette petite ville a une âme. Rien ne jure dans son ensemble architectural bâti au fil des siècles, mêlant bâtiments coloniaux, maisons traditionnelles lao et pagodes ou "vat" qui sont parmi les temples bouddhistes les plus sophistiqués de l'Asie du sud-est. La ville en compte plus d'une trentaine.

Deuxième visite du Palais Royal, maintenant Musée National... ne serait-ce que pour revoir les superbes fresques signées Alix de Fautereau (1894-1989), commande du Roi Sisavang Vong (1885-1959) qui ornent les murs de la salle de réception et sont aujourd'hui classées trésor national. Cinq grands panneaux évoquent la vie à Luang Prabang : Le marché de Luang Prabang, le vieux pont, Vat Mai, Vat Xieng Thong et scènes de la campagne. (photos strictement interdites)






Alix de Fautereau (1894-1989)

Née à Marseille, Alix Angèle Hava fut l'élève de Maurice Denis. Elle épouse Paul de Fautereau , professeur de lettres en 1920 et l'accompagne à Shanghaï puis à Hanoï où elle enseigne le dessin au Lycée français en 1925 et 1926. Le couple rentre en France et se sépare.
Elle revient en Indochine à la fin des années 1920. En 1931, elle épouse le colonel Georges Aymé, frère aîné de l'écrivain Marcel Aymé.
Elle voyage et peint au Laos où elle devient proche de la famille du roi Sisavang Vong









Bougainvillées et hibiscus fleurissent cours et balcons. Cocotiers et bananiers jettent de l'ombre sur les restaurants et cafés, en balcon sur le Mékong.
La balade se poursuit ... 
Descente sur les berges du grand fleuve où quelques artistes sont à l'oeuvre ...


    palette on ne peut plus écolo





... puis massage d'une heure. Sorti de là, avec l'impression d'avoir un hôtel de 100 chambres sous la peau, j'ai comblé une petite faim et savouré un cappuccino sur le retour à la Villa Sokxay, mon QG sur Sakaline, en face Vat Sensoukharam, pour envoyer des nouvelles. 


Demain, je monterai sur le "toit" de la ville.



                                                           novice sur le mont Phu Si

En plein coeur de la ville, cette montagne sacrée s'élève à 150 m au-dessus de la péninsule, plus de 300 marches à grimper pour jouir d'un panorama magnifique sur la ville et ses environs.



   Bouddha couché , sur le mont Phu Si à Luang Prabang







Je me rends vers 18 heures au Victoria Xiengthong Palace pour y dîner d'un poisson du Mékong avec riz collant et pour assister à 19 heures à la projection en plein air, sous les cocotiers, d'un beau petit film , le premier jamais fait sur le Laos, intitulé "Chang", un documentaire poétique  filmé en 1924.





















J'ai loué un vélo tout terrain ce matin et pris la route de Ban Noun Savath à une quinzaine de km de Luang Prabang.
Quelques km après le village de Ban Phanom, un sentier sur la gauche quitte la route pour remonter la rive gauche de la rivière Nam Khan. 
L'endroit est beau et sauvage. Ici est venu mourir Henri Mouhot, un remarquable oublié.

Né le 15 mai 1826 à Montbéliard, naturaliste et explorateur passionné, il effectua avec le soutien de la Société Royale de Géographie de Londres quatre expéditions au Laos, Cambodge et Siam.Terrassé par un accès de fièvre, atteint du mal des bois comme on disait à l'époque, il ne pourra poursuivre son expédition. Il meurt à 35 ans le soir du 10 novembre 1861. Phraï, son fidèle compagnon rapportera ses écrits et ses échantillons à Bangkok.
Ernest Doudard de Lagrée fit élever ce tombeau en 1867, Auguste Pavie le reconstruisit en 1887. Il fut remis en état au début des années 1990.
Montbéliard, sa ville natale, y a fait apposer une plaque.




      JM (d'après André Maire)

                                 JM (d'après André Maire)



             

par ce petit pont de bambou, reconstruit chaque année au début de la saison sèche, on peut se rendre à Ban Xangkhong, petit village de tisserandes et d'artisanat divers, spécialisé depuis des années dans la confection et la vente de soieries et de papier Saa (papier réalisé avec l'écorce du mûrier). Il en coûte 5000 Lao kips pour le franchir. (50 cents  d'euro)



                                          murales dans le village de Ban Xangkhong



  De Luang Prabang, vol pour Jaipur via    Bangkok








                          l'Union Indienne a élu le paon comme symbole pour la représenter.

  
  De Jaipur à Jaisalmer









dans le train Jaipur- Jodhpur

Jaipur


    la forteresse d'Amber, à huit km au nord de Jaipur.


Sorti de Jaipur, la route longe le lac Man Sagar où semble flotter le Jal Mahal, palais construit au XVIIIe siècle, puis s'élève pour pénétrer dans une gorge étroite. On franchit une ligne de murailles et la route débouche dans une vallée encaissée à la beauté sauvage. Apparaît alors, impressionnante de puissance, la gigantesque masse du palais fortifié d'Amber, ancrée à flanc de coteau. Elle est dominée par le fort de Jaigarh et protégée par un cercle de collines fortifiées. À ses pieds s'étend un petit lac artificiel Maota Sagar.

La forteresse actuelle remonte au règne de Man Sing I (fin du XVe) et fut agrandie au XVIIe siècle par Jai Singh I (1621-1667). Jai Singh II y vécut quelque temps avant de l'abandonner, vers 1733, pour s'installer à Jaipur qu'il venait de fonder dans la plaine.


Raja Jai Singh 1 (1611-1667)

     
                                                       

            
                                                             Man Singh I, (1550-1614)






                                                          Jai Singh II, (1699-1743) 

Grand soldat et brillant homme d'État, le souverain était aussi un érudit d'une insatiable curiosité intellectuelle et un astronome réputé qui conçut et fit construire cinq observatoires révolutionnaires.






l'image du soleil, souvent présente. Elle rappelle l'origine solaire  du clan rajput  des Kachhvahas qui régna sur la ville.



Les éléphants avaient été, pendant des générations, le moyen de locomotion favori des princes. Symboles de l'ordre cosmique, nés de la main du dieu Râma, ils étaient à leurs yeux les piliers de l'univers, le soutien du ciel et des nuages. Une fois par an, le maharaja de Mysore se prosternait devant le roi de ses pachydermes. Par cet hommage, il renouvelait son alliance avec les forces de la nature et assurait une année de prospérité à ses sujets. La richesse d'un souverain s'évaluait au nombre, à l'âge et à la taille des éléphants qui peuplaient les écuries de ses palais, et dont certaines abritaient jusqu'à trois cents animaux.
Jamais peut-être, depuis qu'Hannibal avait franchi les Alpes avec sa légion d'éléphants, n'avait-on contemplé un troupeau aussi impressionnant que celui exhibé une fois par an à Mysore à l'occasion de la fête de Dasahra. Un millier de ces animaux, décorés de dessins, de colliers de fleurs, de bijoux, de tapis de selle et de têtières d'or, défilaient à travers la ville. Au mâle le plus fort revenait l'honneur de porter le palanquin du souverain, trône en or massif capitonné de velours et surmonté d'une ombrelle, attribut du pouvoir princier. Derrière, venaient deux autres éléphants aussi richement parés. Ils portaient deux palanquins vides dont l'apparition provoquait un silence respectueux dans la foule : ils étaient sensés transporter les âmes des ancêtres du maharaja.

Cette nuit la liberté
L'épopée de l'indépendance de l'Inde
Dominique Lapierre, Larry Collins




   la forteresse de Jaigarh
Sa fondation remonte au XIIe siècle. Lorsque Man Singh I construisit le palais d'Amber, Jaigarth fit office de donjon, d'armurerie et de trésor.











    à l'intérieur de l'enceinte du fort d'Amber

























    l'entrée du City Palace à Jaipur


















      le Jal Mahal , palais construit au XVIIIe siècle, sur le lac Sagar. à 4 km au nord de Jaipur.
                         
Rien de trop beau pour le Maharaja Madho Singh qui fit construire ce palais comme pavillon  de chasse pour lui-même et son entourage.




      Maharaja Madho Singh (1728-1768) Maharaja  de l'État princier de Jaipur de 1750 à 1768











    Murale sur un temple hindou à Jodhpur




    Le palais des Vents à Jaipur
Un gigantesque paravent ajouré, construit en 1799 pour que les femmes du City Palace puissent jouir en toute fraîcheur du spectacle de la rue, tout en respectant les règles strictes du purdah qui obligeaient les femmes à rester invisibles aux yeux étrangers.






    
  Dans le train Jaipur - Jodhpur














      Choisir un sari à Jodhpur 






De retour du pittoresque et coloré Sadar Bazar à Jodhpur où les scooters aux klaxons impérieux envahissent les plus étroites des rues et obligent à être perpétuellement sur ses gardes, j'éprouvais un besoin de ruralité loin de la pollution et du grouillement chaotique de la foule.

Comme par hasard, ce même soir, alors que j'étais à diner sur le toit-terrasse du Govind Hotel,  Roopo Sing, un homme dans la jeune cinquantaine s'approche et s'invite à ma table. Après la conversation d'usage : "d'où viens-tu ? que fais-tu ? Où vas-tu ?", il m'informe qu'il rentre chez lui à Bhalasariya par le bus demain matin et que si je veux me joindre à lui, il a sur sa propriété une petite cabane où je pourrai passer quelques jours tranquilles et au calme.
"Combien" ? "Tu me donneras ce que tu voudras "
C'est à une quarantaine de km.




   De Jodhpur, en route pour Bhalasariya avec Roopo où je passerai 2 jours chez la famille Singh. 
















à Bhalasariya






      mon QG pour 2 jours






                                                                            Krishna


                                          de la visite ... Kumkum, Mamta et Yashoda






    5 minutes à travers champs et je suis chez mes hôtes





      un couple de paons




     une paone






                                  

     Révision des leçons en attendant l'autobus scolaire ...



    de g à d : Yashoda, Manmohan
le voici ...






 Jaisalmer



Longue journée, commencée vers 8h 30, assis, sac au dos sur le siège arrière de la Honda CD100  1998 de Roopo qui tenait à m'emmener à la gare d'Osiyan située à une trentaine de km pour y prendre  un supposé train pour Jaisalmer.  
Pas de train avant 19 heures 
"Allons boire un chai et avisons !"
Après délibération autour d'un chai masala, Roopo décide de rejoindre Jodhpur. Nous en sommes à 68 km. Il fera d'une pierre deux coups me dit-il, je serai à même de prendre le car pour Jaisalmer et il ira vérifier si par hasard il aurait laissé son portefeuille dans son casier au sous-sol à l'Hôtel Govind. 


Roopo, debout dans une veste rouge et notre bolide, une Honda CD 100 de 1998.

En dépit d'une crevaison que nous avons fait réparer en chemin et un arrêt chai, nous arrivons vers 12h30 à la gare de bus de Jodhpur, grande cour de terre battue très animée où je me dirige vers une grappe humaine derrière laquelle je soupçonne l'existence d'un guichet afin d' y acheter un billet pour Jaisalmer. Chose faite, après un embarquement tumultueux, le bus s'ébranle. À venir, plus de 6 heures de route dans un tintamarre de klaxons.
Bouteilles et déchets volent par les fenêtres.

La route s'étire, rectiligne, dans une étendue sableuse, monotone. Perdue dans le désert du Thar, Jaisalmer apparaît enfin. Sa couleur ocre ne la distingue pas du paysage, mais sa masse imposante, dressée sur la plaine, attire l'oeil.

Construit sur une éminence qui surplombe le désert du Thar et permet de le surveiller sur une grande distance, citadelle dans la citadelle, le fort de Jaisalmer surplombe la ville basse de près de 100m. Jusqu'au XVIIe siècle, toute la cité était contenue dans la double ligne des murailles crénelées, longue de 5 km, haute de plus de 10 m et renforcée de 99 bastions (il paraît) et tours d'angle. Ces remparts évoquent pour toujours les sièges sans merci achevés dans le feu de sacrifices extravagants.
La ville, fondée en 1156, surnommée la ville dorée, doit son importance historique et sa richesse à son rôle d'étape caravanière sur la route entre l'Inde et la Perse, l'Arabie et l'Occident.

Bonne nouvelle, Roopo a retrouvé son portefeuille












       vol au-dessus des Spitzberg, mer du Groenland, mer de Barents, 78 54' 00" N - 18 01' 00" E 


                                                             
Et le voyage continue ...
And the journey continues ...

nomadensolo@gmail.com

1 commentaire:

Gildas Philippe a dit…

Super beau voyage.
Le Radjasthan est (était) un endroit magique.