VERCORS

                           
Parc Naturel Régional du Vercors


mes étapes dans les départements de l'Isère et de la Drôme
Lans-en-Vercors / Corrençon-en-Vercors /
Abri de la Jasse du Play / La Chapelle-en-Vercors / Col de Carri / Bouvante-le-Haut /
Peyrus   

De St Nizier-du-Moucherotte, par le GR9 vers Sornin , via Engins jusqu'à Lans-en-Vercors par les gorges du Furon. Nuitée à Lans. De Lans, par une petite route jusqu'à Villard-de-Lans pour rejoindre Corrençon-en-Vercors par la crête du Peuil. Nuitée au gîte communal de Corrençon.







"Jamais je n'ai tant pensé, tant existé, tant vécu, tant été moi si j'ose ainsi dire, que dans les voyages que j'ai faits seul et à pied. La marche a quelque chose qui anime et avive mes idées: je ne puis presque penser quand je reste en place; il faut que mon corps soit en branle pour y mettre mon esprit. La vue de la campagne, la succession des aspect agréables, le grand air, le grand appétit, l'éloignement de tout ce qui me fait sentir ma dépendance, de tout ce qui me rappelle à ma situation, la bonne santé que je gagne en marchant, la liberté des mouvements, tout cela dégage mon âme, me donne une plus grande audace de penser, me jette en quelque sorte dans l'immensité des êtres pour les combiner, les choisir, me les approprier à mon gré sans gêne et sans crainte.
Je dispose en maître de la nature entière.

Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions.








"Avant une heure, même les jours les plus ardents, je partais par le grand soleil, pressant le pas, dans la crainte que quelqu'un ne vînt s'emparer de moi avant que j'eusse pu m'esquiver; mais quand une fois j'avais pu doubler un certain coin, je commençais à respirer en me sentant sauvé, en me disant: "Me voilà maître de moi pour le reste de ce jour!"

Jean-Jacques Rousseau à M.de Malesherbes dans une lettre  du 26 janvier 1762.














En sortant d'une longue et douce rêverie, en me voyant entouré de verdure, de fleurs, d'oiseaux et laissant mes yeux errer au loin sur les romanesques rivages qui bordaient une vaste étendue d'eau claire et cristalline, j'assimilais à mes fictions tous ces aimables objets; et me trouvant ainsi ramené par degrés à moi-même et à ce qui m'entourait, je ne pouvais marquer le point de séparation des fictions aux réalités; tant tout concourait également à me rendre chère la vie recueillie et solitaire que je menais.

                     J-J Rousseau 



"Regardez au coeur de la nature,
tout sera alors plus simple"
Albert Einstein














                                                          près du lieu-dit  Les Ravières


















Rien n'est charmant, à mon sens, comme cette façon de voyager. - À pied ! -
On s'appartient, on est libre, on est joyeux; on est tout entier et sans partage aux incidents de la route, à la ferme où l'on déjeune, à l'arbre où l'on s'abrite, à l'église où l'on se recueille. On part, on s'arrête, on repart; rien ne gêne, rien ne retient. On va et on rêve devant soi. La marche berce la rêverie; la rêverie voile la fatigue. La beauté du paysage cache la longueur du chemin. On ne voyage pas, on erre. À chaque pas qu'on fait, il vous vient une idée. Il semble qu'on sente des essaims éclore et bourdonner dans son cerveau. Bien des fois, assis à l'ombre au bord d'une grande route, à côté d'une petite source vive d'où sortait avec l'eau la joie, la vie et la fraîcheur, sous un orme plein d'oiseaux, près d'un champ plein de faneuses, reposé, serein, heureux, doucement occupé de mille songes, j'ai regardé avec compassion passer devant moi, comme un tourbillon où roule la foudre, la chaise de poste, cette chose étincelante et rapide qui contient je ne sais quels voyageurs lents, lourds, ennuyés et assoupis; cet éclair qui emporte des tortues. Oh! Comme ces pauvres gens, qui sont souvent des gens d'esprit et de coeur, après tout, se jetteraient vite à bas de leur prison, où l'harmonie du paysage se résout en bruit, le soleil en chaleur et la route en poussière, s'ils savaient toutes les fleurs que trouve dans les broussailles, toutes les perles que ramasse dans les cailloux, toutes les houris que découvre parmi les paysannes l'imagination ailée, opulente et joyeuse d'un homme à pied !
Et puis tout vient à l'homme qui marche. Il ne lui surgit pas seulement des idées, il lui échoit des aventures; et, pour ma part, j'aime fort les aventures qui m'arrivent. S'il est amusant pour autrui d'inventer des aventures, il est amusant pour soi-même d'en avoir.

Victor Hugo, Le Rhin, lettres à un ami, Lettre XX



Cabane de Carette (alt 1350m)






       
La marche est un milieu entre deux excès: ce qu'Aristote appelle "une vertu". Elle se tient à égale distance de l'agitation, d'un côté, et de l'immobilisme , de l'autre. L'agité est toujours en retard de quelque chose. Il n'a pas le temps, il doit au contraire le rattraper. Il vit dans l'entre-deux et poursuit un présent qui, semble-t-il, n'a de cesse de le fuir. À se demander d'ailleurs, à l'écouter, si le présent existe; en tout cas, s'il existe, pour lui, il n'existe pas assez. Quand vous croisez un agité, il vous récapitule tout ce qu'il a fait et tout ce qu'il a à faire, avec l'air hagard de celui qui se sent pourchassé. Il vous quitte sans avoir pris la peine de s'enquérir de vous, de vos activités, de vos projets ... Vous a-t-il seulement reconnu?
                                      Christophe Lamoure "Petite philosophie du marcheur"


 








"Entre la marche à pied et la course à pied, la différence est radicale. Ce n'est pas une différence de degré mais une différence de nature qui les sépare. L'un fait violence au temps qu'il veut en quelque façon contracter, réduire: c'est le coureur qui va le plus vite possible. L'autre veut s'accorder au temps comme il passe, se calquer sur son rythme le plus intime, le plus essentiel : c'est le marcheur qui cherche la synchronie entre son pouls et le pouls du monde. Si le coureur est pressé, le marcheur est oisif. Le premier n'a pas le temps, le second prend le temps".





La marche favorise la réflexion, plus que ça, elle la stimule. Le pas ouvre l'espace de la méditation aussi bien que celui de la pérégrination. Rendue à la beauté, au silence et à la lenteur, l'âme reprend souffle et contact avec les éléments simples et nécessaires à son expression. Une bonne marche en montagne, lente et longue, permet souvent de réintroduire, dans l'âme et dans le corps, l 'harmonie détruite par le bruit, la laideur et l'affolement de la vie citadine.

La marche défait les noeuds qui nous tiennent à ce monde matériel et intéressé, et elle spiritualise le corps, c'est à dire permet à l'esprit de l'habiter à nouveau.

Christophe Lamoure."Petite philosophie du marcheur"





Sylvain Tesson, né en 1972, est géographe, journaliste et écrivain. Membre de la Société des Explorateurs Français, il partage sa vie entre expéditions au long cours, écriture et réalisations de documentaires d'aventure.

"Une force extérieure m'emporte sur la terre avec la régularité d'un battant d'horloge...
J'ai détecté dans le voyage aventureux un moyen d'endiguer la course des heures sur la peau de ma vie. Je n'ai pas découvert le secret de l'immortalité, sinon mon corps ne vieillirait pas. Or, il change lentement, presque placidement, à la manière des éléphants: j'ai les muscles qui gonflent, le coeur qui ralentit, déjà les dents qui s'usent. Mais je me suis enfin réveillé de ce cauchemar dans lequel le temps s'enfuyait comme s'il avait commis une faute. Grâce à la route, je me suis mis en marche, je me maintiens en mouvement et, paradoxalement, c'est quand j'avance , devant moi , que tout s'arrête:  le temps et l'obscure inquiétude de ne pas le maîtriser...

... Le nomadisme est la meilleure réponse à l'échappée du temps. Mon but n'est pas de le rattraper mais de parvenir à lui être indifférent...

Il y a deux ans, lorsque je cinglais à cheval, dans la désolation du désert de Gobi avec la solitude pour compagne, les minutes comptaient pour des heures et les journées des années. Au retour de six mois de chevauchée touranienne ou de huit mois de lutte sur les pistes d'Eurasie, je rentrais avec le sentiment d'avoir vécu une vie entière. En dix années, après quatre voyages au long cours, j'ai connu quatre existences propres. Il m'en faut encore cinq pour arriver à neuf vies et aspirer au repos, vieux chat content de son tableau de chasse."

Sylvain Tesson,  "Petit traité sur l'immensité du monde"




                                                      Le Grand Veymont (alt 2341m)




De Corrençon jusqu'à la nouvelle Jasse de la Chau sur les hauts plateaux du Vercors par le GR 91. GRP Sentier Central introuvable. Rebroussé chemin vers le refuge de la Jasse du Play où je passe la nuit. Six degrés dans la cabane. Une croûte de pain de reste et à peine un verre d'eau dans ma bouteille. Dehors à 6 heures le lendemain matin, traversée de la forêt domaniale du Vercors à la boussole pour rejoindre St Agnan-en-Vercors puis La Chapelle-en-Vercors. Nuitée à La Chapelle.



                                                      Abri de la Jasse du Play (alt 1610m)


                "Si tu veux te trouver, commence par te perdre"
                                                      Jacques Lanzmann (1927-2006)





















                                                                      Triste Histoire





                                      Jour de marché à La Chapelle-en-Vercors (Drôme)

































De la Chapelle-en-Vercors, par la route pour retrouver le Sentier Central jusqu'au Col de Carri où je passe la nuit au gîte de la Sacha...









"Qu'il fasse beau, qu'il fasse laid, c'est mon habitude d'aller sur les cinq heures du soir me promener au Palais-Royal. C'est moi qu'on voit, toujours seul, rêvant sur le banc d'Argenson. Je m'entretiens avec moi-même de politique, d'amour, de goût ou de philosophie. J'abandonne mon esprit à tout libertinage"

Denis Diderot. "Le neveu de Rameau"






































Puis Bouvante-le-Haut au gîte communal. Pas chaud dans la cabane mais qu'à celà ne tienne ... il y a un stère de bois contre le pignon. Peu de temps a suffi pour faire ronfler le poêle. Repas du soir chez le fermier, gardien de la clé du gîte. De là ...





    Refuge de Bouvante, la porte jaune à gauche.








  ...  je rejoins Peyrus à une vingtaine de kilomètres de Valence par Le Grand Échaillon et Léoncel.



Église abbatiale de Léoncel. Inscrite en 1840 par Prosper Mérimée sur la première liste des monuments     historiques. Bel exemple de l'architecture cistercienne, sous l'influence de divers courants: choeur et abside (fin 12e) d'inspiration provençale, nef et décor roman bourguignons, clocher de style dauphinois.





                                               
                                                          Église abbatiale de Léoncel (Drôme)



Et le voyage continue ...
And the journey continues ...

nomadensolo@gmail.com

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